ARTICLE DE MYLORRAINE.FR

La «Victoire» en chantant La comédienne Nadine Ledru a créé le personnage de Madame Victoire, chanteuse de l'Entre- Deux-Guerres qui ressuscite les chansonnettes de l'époque. En ranimant tout un monde de «gigolettes» et de «marlous», Madame Victoire offre à qui veut l'entendre un voyage dans les années où «la chose chantée avait un rôle social».

MyLorraine.fr a rencontré ce personnage populaire et profond. Il y avait le «Père la Victoire», comptez désormais sur «Madame». Mais rien à voir avec Georges Clémenceau et ses moustaches de « tigre »... Car Madame Victoire communie elle aussi avec la foule, mais en chantant. Les yeux grands écarquillés, façon « j'hypnotise mon auditoire », la gouaille chaude et puissante, jamais vulgaire, la gestuelle enflammée, bref, Madame Victoire c'est la Goulue, Fréhel et Mistinguett qui débarqueraient dans ce nouveau siècle.

Mais pas d'anachronisme, ni de revival musical, non, Madame Victoire remet juste au goût du jour « les chansonnettes de caf-conc' » (café- concert). Ainsi debout sur son tabouret de café, face aux clients, c'est un peu de La Liberté guidant le peuple du peintre de Delacroix que l'on retrouve dans sa prestation. La comédienne Nadine Ledru, enfant de la vallée de l'Orne se produit avec « ce personnage de pauvre fille qui en a bavé mais qui a conservé le goût de vivre », un peu partout en Lorraine.

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Aux terrasses des bistrots comme lors des dernières « poursuites » du NJP, dans les maisons de retraite, dans les jardins publics... Mais si le personnage de Madame Victoire tient son origine du pavé, le spectacle créé par la comédienne Nadine Ledru a été construit pour le théâtre. Une vingtaine de morceaux, puisé dans le répertoire des chansonnettes des années 30, Brecht et Fréhel en tête.

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Avec pour l'instant une douzaine de représentations chaque année depuis 2005, Madame Victoire se fait rare. Dommage ! Avis aux directeurs de salle. A l'heure où la France gronde, ce personnage qui va au contact « des petits beuglants des quartiers en quête de plaisirs grivois », assure un «rôle social». « Une chansonnette de cafconc' en apprenait parfois plus sur la mentalité collective du début du 20ème siècle qu'un savant et volumineux exposé d'intellectuel », explique Nadine Ledru.

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Se produisant aux côtés de l'accordéoniste Dédé Cuttitta, de Stéphan Hernandez à la clarinette basse et de la danseuse Leïla Bessahli, Nadine Ledru incarne avec maestria ce personnage de chanteuse qui « parle du petit peuple, des femmes, des peines, des colères », avec la fougue et l'envie chevillées à l'âme. « Madame Victoire n'a pas besoin de pancartes, c'est une pancarte », une curiosité chantante qui fédère l'inconscient collectif et fait éclore à nouveau l'extraordinaire patrimoine culturel d'une époque aux richesses insoupçonnées. Celle où les chanteuses s'imposaient de bistrot en bistrot sur la butte Montmartre. Parmi elles, une certaine Edith Piaf allait parvenir jusqu'au sommet. Des décennies après, Madame Victoire rend hommage à toutes ces femmes de la rue, fortes et fières, à la langue parfois râpeuse, qui égratignent le bourgeois en goguette mais qui ont pleinement respiré l'air de leur temps.

Mathieu Bonis 




 

 

 

     
 
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